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M. le Président. — Huissier, appelez M. Souffrain.

L’huissier audiencier. — Monsieur le Président, M. Souffrain ne répond pas. — Voici M. de la Batut.

DÉPOSITION DE M. DE LA BATUT
Député.

Me Clémenceau. — Monsieur le Président, voudriez-vous demander à M. de la Batut si, quand il a fait son volontariat, il n’a pas été directement sous les ordres de M. du Paty de Clam, alors lieutenant ?

M. de la Batut. — J’ai été sous les ordres de M. du Paty de Clam en 1876, pendant que je faisais mon volontariat au 17e de chasseurs à cheval.

Me Clémenceau. — Voudriez-vous demander au témoin si, pendant qu’il était sous les ordres du lieutenant du Paty de Clam, une punition de quinze jours de prison ne lui a pas été infligée ? pour quel motif elle lui fut infligée ? et dans quelles conditions elle a été levée ?

M. de la Batut. — A cette époque, M. le lieutenant du Paty de Clam était chargé de faire un cours aux engagés conditionnels d’un an. Quand les engagés conditionnels sont arrivés au régiment, on leur a donné pour sujet de composition d’histoire les guerres du premier Empire, j’ai fait ma composition tant bien que mal. Autant que mes souvenirs me permettent de me le rappeler, je l’ai terminée en disant qu’il était à souhaiter que ce fût l’intelligence et non pas le canon seul qui gouvernât le monde.

Le lendemain, le lieutenant-colonel commandant le régiment en l’absence du colonel, me fit venir dans la salle des rapports et il me dit : « Vous êtes du Midi ? Vous aurez quinze jours de prison. » (Rires dans l'auditoire.) Je répliquai : « Mon colonel, je ne suis pas tout à fait du Midi, je suis de la Dordogne. » — « Si, si, vous êtes du Midi, vous aurez quinze jours de prison pour votre composition », et on m’emmena en prison. Le colonel, qui était absent, revint le lendemain matin ; il trouva probablement ma punition excessive, car il s’empressa de la lever.

Me Clémenceau. — Cette punition ne fut-elle pas remplacée par une autre d’un caractère un peu plus général ?

M. de la Batut. — Si ; le colonel me dit : « Je lève votre punition parce qu’on est allé un peu loin et que vous n’avez pas encore l’esprit militaire ; mais tous vos camarades et vous, vous serez privés de permission pendant un mois.

M. le Président. — Voudriez-vous nous dire, sur la demande de M. l’Avocat général, le numéro de votre régiment et la date où vous y étiez ?

M. de la Batut. — C’était en 1876, et le régiment était le