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la guerre à ce moment-là, je ne peux donc pas lui demander si une enquête a été faite ; je l’aurais demandé à M. le général Billot, s’il était venu.

Mais, en 1894, sans que ma question vise en rien l’affaire Dreyfus, uniquement au point de vue de la façon dont était surveillée la sortie de certains renseignements confidentiels du ministère de la guerre, M. le général Mercier pourrait-il nous dire s’il a fait une enquête relativement aux indiscrétions commises au profit de certains journaux, notamment au profit de la Libre Parole et de l'Eclair.

M. le général Mercier. — A quel moment aurait eu lieu cette indiscrétion ?

Me Labori. — Les publications, qui ont annoncé d’ailleurs l’arrestation du capitaine Dreyfus, sont un article de la Libre Parole du 29 octobre, puis un article de l'Eclair au 30 et du 31 octobre, puis un article de la Libre Parole qui déclare que d’autres journaux, et notamment l'Eclair, ayant parlé, il n y a plus de raison pour taire la vérité, et ce journal fait tout un récit. Je désirerais savoir, à raison de ce qu’un grand nombre de points en ont été démontrés vrais, si M. le Ministre de la guerre a fait une enquête sur les conditions dans lesquelles ces renseignements sont parvenus aux journaux.

M. le général Mercier. — Je n'ai fait aucune enquête ; ces publications ont été faites en dehors du ministère de la guerre, et, si vous me demandez mon opinion, elles ont été faites tout à fait contrairement aux intentions du Ministre de la guerre.

Me Labori. — Monsieur le général Mercier pourrait-il nous dire à qui il attribue cette publication, lui qui parait connaître les intentions dans lesquelles cette communication a été faite ?

M. le général Mercier. — Je ne connais pas du tout dans quelles intentions cela a été fait ; je dis que cela a été fait contrairement aux intentions du Ministre de la guerre et je suis autorisé à le dire, puisque j’étais ministre à cette époque.

Me Labori. — Par conséquent, il résulte des déclarations de M. le général Mercier que le Ministre ne voulait pas la communication qui a été faite à ce moment-là, communication de renseignements qui, eux, ont été donnés par le Cabinet, puisqu’il s’agissait de faits qui, à ce moment-là, n’étaient à la connaissance de personne. Je demande donc à Monsieur le général Mercier, qui était alors ministre de la guerre, s’il a une notion quelconque sur la personne ou sur les personnes à qui on peut attribuer cette communication, et je lui demande de répéter si, à ce moment, bien que ses intentions aient été mal inteprétées par ceux qui avaient fait la communication, il n"a fait aucune enquête ?

M. le général Meroier. — Je crois que ceux qui ont fait la publication ne connaissaient nullement mes intentions : cette publication pouvait ne pas venir du ministère ; elle pouvait venir de la famille Dreyfus.