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INCIDENT
Déclaration de Me Labori relativement à la distribution
aux jurés de documents et de brochures.

Me Labori. — Monsieur le Président, voulez-vous bien me permettre, avant d’aborder la déposition du premier témoin, d’adresser un mot à MM. les jurés sur un incident d’ordre purement matériel.

Nous apprenons, Messieurs les jurés, qu’un certain nombre de documents et de brochures vous ont été distribués. Je tiens à vous déclarer hautement que ces brochures, que ces documents n’émanent ni de M. Emile Zola, ni du gérant de L'Aurore, ni de la famille Dreyfus elle-même, auprès de laquelle j’ai pris soin de me renseigner.

Une voix. — Le Syndicat !

Me Labori. — Ni de la famille Dreyfus elle-même, auprès de laquelle j’ai pris soin de me renseigner.

J’ai considéré, pour ma part, que la remise entre vos mains, même avant le débat, de certains documents qui sont, pour la plupart des documents officiels, — et parmi lesquels : 1° l’acte d’accusation, ou plutôt le rapport qui a été publié relativement à l’affaire du capitaine Dreyfus en 1894 ; 2° le rapport de M. Ravary dans l’affaire Esterhazy, et quelques autres documents que je vous prie d’ailleurs de vous procurervous-mêmes, car ils sont en vente ; — j’ai considéré que ces documents pouvaient vous être utiles. Nous avons délibéré, mes clients et moi, sur la question de savoir si nous devions vous les remettre et, bien que ces documents soient publics, nous avons tenu, pour rester dans une attitude d’une correction presque exagérée, à ne rien vous faire remettre.

Ceux qui parlent toujours du Syndicat, il y en a ici, et qui font partie, j’imagine, d’un autre Syndicat...

M. le Président. — Maître Labori, je vous en prie, plus de calme. Dites à MM. les jurés ce que vous avez à dire.

Me Labori. — Permettez, j’ai la prétention d’avoir énormément de calme.

Ces brochures ne venant pas de nous, Messieurs, ne peuvent venir que de là, et j’ai tenu à protester.

Pendant que j’en suis à faire cette protestation, je tiens encore à en faire une autre, et je suis persuadé que M. le Président ne trouvera pas à y contredire.

Aujourd’hui, dans un certain nombre de journaux qui, au point de vue du compte rendu des débats, ne brillent que par l’inexactitude, on écrit, on imprime que M. Emile Zola a été hier hué, bousculé, frappé.

Frappé, ce n’est pas vrai ! Hué ? Par quelques-uns, peut-être.