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Me Labori. — Pour l’affaire Zola, c’est-à-dire la bonne foi de M. Zola quand il a écrit sa lettre.

M. le Président. — La bonne foi de M. Zola sur l’affaire Dreyfus ?

Me Labori. — La bonne foi de M. Zola sur l’affaire Dreyfus ? Je ne comprends pas ce que cela veut dire.

M. Zola a accompli un acte considéré comme délictueux. Nous prétendons qu’il a accompli cet acte de bonne foi et nous demandons au témoin, qui est cité pour faire la preuve de notre bonne foi, ce qu’il pense de la bonne foi de M. Zola ?

Quant à l’affaire Dreyfus et à l’affaire Esterhazy, elles ne se rattachent que d’une façon indirecte...

M. le Président. — D’une façon indirecte ?

Me Labori. — L’affaire Zola ne se rattache...

M. le Président. — Il n’y a pas d’affaire Zola. (Bruits et rires.)

Me Labori. — Messieurs les jurés, vous apprécier.

M. le Président. — Il y a l’affaire Dreyfus et l’affaire Esterhazy.

Me Labori. — Monsieur le Président, j'ai posé des conclusions.

Je les précise verbalement, quoiqu’elles m’aient paru assez claires en elles-mêmes : car, je le répète, il ne peut être question que de la bonne foi de M. Zola quand il a écrit sa lettre.

Je suis prêt à préciser par écrit dans les mêmes termes.

Après cela, je n’ai plus rien à ajouter. Il appartient à la Cour et au Président de savoir si la question peut être vidée. Sinon, nous nous réserverons de tirer de la situation les conséquences qu’elle pourra comporter.

M. le Président. — Je ne pourrai interroger Mme Dreyfus sur la bonne foi de M. Zola qu’en ce qui concerne l’affaire Esterhazy, mais pas en ce qui concerne l’affaire Drevfus.

Me Clémenceau. — Je crois que vous faites une erreur matérielle, car il n’y a pas d’affaire Drevfus : depuis deux jours, on répète qu’il ne sera pas question de l’affaire Dreyfus.

Je ne comprends donc pas que vous demandiez aujourd’hui si nous voulons poser la question sur l’affaire Dreyfus, puisque vous avez répété depuis le commencement des débats que le Ministère public était lié par les conclusions de M. le Ministre de la guerre et que, dans ces conditions, il n’y avait que quinze lignes de la lettre de M. Zola...

M. le Président. — Voilà comment vos conclusions sont rédigées :

« Qu’est-ce que vous pensez de la bonne foi de M. Zola ? »

Eh bien ! M. Zola n’est poursuivi que pour l’affaire Esterhazy. Je veux bien poser la question sur la bonne foi de M. Zola en ce qui concerne l’affaire Esterhazy ; je ne la poserai pas en ce qui concerne l’affaire Dreyfus.

Me Labori. — Le Président et la Cour feront comme ils l’entendront. Ils sont juges souverains.