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cartulaire de l’abbaye cistercienne de pontigny.

de possessions que développa le monastère, d’abord, autour de l’abbaye même, puis vers la forêt d’Othe, au nord, et Villiers, au sud, toutes terres qui, au fil des années, acquirent une plus grande cohésion grâce à toute une politique d’achats et d’échanges.


IV. Évolution du temporel au xiiie siècle.


Les modes d’acquisition.

Au xiiie siècle, les modes d’acquisition restent les mêmes.

C’est toujours la donation qui alimente essentiellement la croissance du patrimoine de l’abbaye. Les formules des actes semblent définitivement fixées : on donne « en pure et perpétuelle aumône » ou « perpétuellement ». Par contre, de plus en plus, le donateur exige une contre-partie à son aumône. Pour les uns, il s’agit de faire célébrer par Pontigny leur propre anniversaire après leur mort ou celui d’un de leurs parents ou prédécesseurs. Certains même précisent qu’ils désirent être associés aux bienfaits de l’église[1] ou bénéficier des prières et oraisons des moines[2] ou encore être enterrés dans l’abbaye[3]. Parfois enfin, la donation est consentie pour se faire pardonner des exactions commises contre le monastère et recevoir ainsi l’absolution[4]. Certains donateurs assignent un rôle précis à leur aumône tel seigneur concède une rente pour faire une pitance aux moines de l’abbaye chaque année, c’est-à-dire leur faire servir un repas le jour de son anniversaire[5].

À côté des exigences proprement spirituelles, nous voyons Pontigny consentir parfois contre un don une rente à vie au donateur : Jean, curé de Venouse, par exemple, fait don aux moines de ses prés, mais reçoit en compensation, sa vie durant, une charretée de foin[6]. Ou bien le donateur se réserve la jouissance de ce qu’il a donné jusqu’à sa mort Jean de Rougemont concède tous ses biens à Pontigny, mais il en garde l’usufruit pendant sa vie et, si sa femme lui survit, elle conservera jusqu’à sa mort son douaire[7]. Enfin, nous possédons un cas particulier dans lequel il est offert à l’église de Pontigny une somme d’argent à condition que ce numéraire serve à l’achat de dix livrées de terre[8]. En fait ce n’est qu’une sorte de clause de garantie, d’autant que, dès 1193, le Chapitre général autorisa les abbayes cisterciennes, et surtout leur abbé, à changer la destination d’un don, s’ils le jugeaient bon[9].

Une autre forme de don se développe aussi à cette époque c’est le legs. Le cartulaire renferme plus d’une quinzaine d’actes de ce genre[10] : nous les

  1. N° 337.
  2. nos 231, 305.
  3. nos 185, 201, 214.
  4. N° 216.
  5. nos 163,174,184,192,195,202,204,290.
  6. N° 119.
  7. N° 343.
  8. N° 204.
  9. Canivez, Statuta… , t. I. p. 158, n° IV.
  10. nos 169, 202, 205, 214, 234, 256, 259, 299, 315, 367, 328, 337, 387, 328.