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LE POISSON D’OR

Vincent se mit à genoux devant elle et lui baisa les deux mains.

On ne dit plus un mot, mais les regards se parlèrent ; le parchemin alla dans le foyer où chauffait le breuvage du malade. Il fut longtemps à brûler ; on aurait pu se raviser et l’y reprendre.

Le grand-père bénit ses enfants ; sur son visage transfiguré, je vis couler sa dernière larme.

Voilà, madame la duchesse, la belle-mère de votre jeune sœur resta seule ; son grand-père était mort, et son mari voyageait au loin. Si je ne craignais de vous faire honte, je vous avouerais que Mme la comtesse de Chédéglise fut obligée de travailler pour vivre. Il n’y avait que moi, cependant, à regretter le testament détruit.

Que le ciel procure à vos chers enfants de pareilles mésalliances dans l’avenir ! Je ne puis dire tout ce que je sens, et la présence de Mme la comtesse a gâté mon histoire.

Vincent ne resta qu’un mois lieutenant de commerce. La guerre venait d’éclater entre la France et l’Angleterre. Les ports de l’ouest remontaient les caronades de ces héroïques navires qui furent la gloire de notre marine : je veux parler des corsaires bretons. La vocation de Vincent s’éveilla tout d’un coup : il était soldat sans le savoir. Il fit la course sous Magon de la Vieuville et sous Potier de la Houssaye, l’ami, le parent et le rival de Robert Surcouf. En 1810. M. Surcouf lui donna le Victor-Amédée, trois mâts portant seize canons, et dont tous nos matelots connaissent les aventures légendaires.

Ce fut la France madame la duchesse, qui, en 1815, rendit aux familles de Penilis et de Keroulaz, désor-