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c’est en partie celle de la première section du livre d’Hénoch[1] : « Ils pensent que les âmes ont une énergie immortelle ; selon qu’on a pratiqué le bien ou le mal pendant la vie on reçoit sous la terre des châtiments ou des récompenses ; les unes demeurent éternellement enfermées, les autres ont la faculté de vivre de nouveau[2] ». Cela dans les Antiquités. Dans la Guerre juive, Josèphe a donné à sa pensée un tour plus indécis, qu’on eût pu interpréter dans le sens de la métempsycose, à ignorer les opinions pharisiennes : « toute âme est immortelle, celle des bons seule passe dans un autre corps, celles des méchants subissent un châtiment éternel[3] ».

Peut-être Josèphe préféra-t-il, en exposant les opinions des Pharisiens et des Sadducéens comme s’il s’agissait de sectes philosophiques, laisser leur pensée dans un certain vague auquel les étrangers donneraient plus facilement un sens qui leur parût acceptable. Quoi qu’il en soit, la résurrection des bons est uniquement dans l’ordre de la rétribution, dans un ordre presque abstrait, sans aucune nuance de messianisme. Quant aux méchants, Josèphe paraît les exclure complètement de la résurrection. En quoi il a généralisé à l’excès, ne voulant point exposer à la discussion des Gentils des points trop particuliers. Il est certain qu’il ne pouvait nommer la résurrection des pécheurs une nouvelle vie ; c’eût été contraire à l’opinion générale, telle que nous la connaissons par tous les autres textes. Mais, d’autre part, le passage même du livre d’Hénoch qui n’admet pas la résurrection de tous les pécheurs[4] l’accepte cependant pour une catégorie d’entre eux, peut-être la plus nombreuse dans sa pensée.

Personne dans Israël ne pouvait la nier absolument, à moins de rejeter l’autorité de Daniel[5].

C’est son texte que prenait pour point de départ la discussion entre Hillel et Chammaï sur le sort de ceux qui n’étaient ni bons ni mauvais[6].

L’école de Chammaï dit : Il y a trois classes ; l’une pour la vie éternelle, l’autre pour les opprobres pour une durée éternelle (Dan. xii, 2) : ce sont les méchants qui

  1. Voir plus haut, p. 165.
  2. Ant. XVIII, i, 3 : ἀθάνατόν τε ἰσχὺν ταῖς ψυχαῖς πίστις αὐτοῖς εἶναι καὶ ὑπὸ χθόνον δικαιώσεις τε καὶ τιμὰς οἷς ἀρετῆς ἢ κακίας ἐπιτήδευσις ἐν τῷ βίῳ γέγονεν, καὶ ταῖς μὲν εἰργμὸν ἀΐδιον προτίθεσθαι, ταῖς δὲ ῥαστώνην τοῦ ἀναϐιοῦν.
  3. Bell. II, viii, 14 : ψυχήν τε πᾶσαν μὲν ἄφθαρτον, μεταϐαίνειν δὲ εἰς ἕτερον σῶμα τὴν τῶν ἀγαθῶν μόνην, τὰς δὲ τῶν φαύλων ἀϊδίῳ τιμωρίᾳ κολάζεσθαι.
  4. Hén. éth. xxii.
  5. Dan. xii, 2.
  6. Tosefta Sanh. xiii, 3 : בית שמאי אומ׳ שלש כותות הן אחת לחיי עולם ואחת לחרפות לדוראון עולם אלו רשעים גמורים שקולין שבהן יורדין לגיהנם ומצמפצפין