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lut d’Israël, comme pour révéler le sens profond des voies de Dieu : il est juste pour chaque être, individu ou collectivité. S’il a châtié la nation, c’est qu’elle le méritait. On voit que l’idée de justice et de rétribution prime tout, et avec quelle netteté l’homme est mis en présence de lui-même. Son bonheur, — sa vie auprès du Seigneur, — est entre ses mains ; il ne dépend donc pas d’un avènement messianique, car celui-là n’est pas en sa puissance. La vie auprès du Seigneur, c’est la conception la plus haute de l’autre monde, de la vie future. Aucun développement d’une existence plantureuse ne ternit cette belle idée empruntée à la plus pure tradition de l’Ancien Testament ; seule la résurrection est mentionnée, rattachée à la vie éternelle. Quant aux pécheurs, tous les textes les menacent du châtiment ; on dirait d’abord qu’ils sont voués à la destruction ; ils continuent cependant d’exister pour souffrir, seulement ils ne sont pas ressuscités.

Il est tombé, sa chute est rude, et il ne ressuscitera pas,
la perte du pécheur est éternelle,
et on ne se souviendra pas de lui, au moment où les justes seront visités.
Telle est la part des pécheurs à jamais.
Mais ceux qui craignent le Seigneur ressusciteront pour la vie éternelle,
et leur vie sera dans la lumière du Seigneur et ne défaillera plus[1].

Ou encore :

Les pécheurs périront à jamais au jour du jugement du Seigneur,
lorsque Dieu visitera la terre en la jugeant,
pour châtier les pécheurs à jamais.
Mais ceux qui craignent le Seigneur trouveront grâce en ce [jour],
et vivront dans la bienveillance de leur Dieu[2].

Dans ce dernier passage, le châtiment éternel des pécheurs suppose bien leur existence ; ailleurs, ils sont jetés en enfer, les saints ont en partage la vie bienheureuse :

Aussi leur héritage est-il l’Hadès, et les ténèbres, et la perdition ;
ils ne paraîtront pas au jour où il sera fait miséricorde aux justes ;
mais les saints du Seigneur hériteront de la vie dans le bonheur[3].
La vie des justes dure à jamais,
mais les pécheurs seront enlevés pour la perdition,
et on n’en trouvera plus le souvenir,
tandis que la miséricorde du Seigneur sera sur les saints,
et sa miséricorde sur ceux qui le craignent[4].

  1. iii, 13-16.
  2. xv, 13-15, bienveillance traduit ἐν τῇ ἐλεημοσύνῃ, représentant probablement בצדקה, en suite d’un juste jugement.
  3. xiv, 6. 7.
  4. xiii, 9-11.