Page:Le messianisme chez les Juifs.pdf/153

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

le moindre soupçon d’une vie religieuse nouvelle, plus intérieure, plus inspirée par l’amour de Dieu et du prochain. Ce n’est pas un progrès dans le sens du christianisme, ni même le développement de la doctrine d’Israël, c’est un recul très caractérisé du sentiment religieux tel qu’on le trouve dans les grands prophètes et chez les psalmistes, recul mal dissimulé par un élan disproportionné vers l’inaccessible et l’insondable, par la fougue d’aspirations qui cherchent en vain la solution de questions que Dieu seul pouvait résoudre. Entre la sève religieuse des Écritures inspirées et le naturalisme sensé des Grecs, les apocalypses apparaissent comme un genre faux, dont les ardeurs surchauffées ne peuvent émouvoir les gens de sang-froid. Elles ont voulu se placer entre ciel et terre ; elles n’ont ni l’inspiration d’en haut, ni l’attrait de la nature et de la vie.

M. Baldensperger[1] leur applique avec esprit ce mot d’Hénoch : « J’entrai dans cette maison ; elle était brûlante comme du feu et froide comme de la neige ; et il n’y avait dans cette maison aucun des agréments de la vie »[2] — si ce n’est quelques parcelles de l’enseignement divin conservées dans ce fatras.

  1. Op. laud., p. 70.
  2. Hén. xiv, 13 (Trad. Martin).