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maintenant donc, Dieu, Seigneur et Roi grand, je te supplie et te demande d’exaucer ma prière…[1].

C’est aussi clair que possible dans le sens cosmologique sans même aucune allusion à la royauté particulière de Dieu sur Israël.

Dans un passage cependant, on se transporte par la pensée dans les temps à venir. Dieu viendra régner sur la terre ; mais c’est comme Roi éternel qu’il viendra. Ce sera donc, comme dans les textes rabbiniques, moins un règne nouveau que le plein exercice du règne ancien :

Cette haute montagne que tu as vue, dont le sommet ressemble au trône du Seigneur, c’est (précisément) son trône, sur lequel siégera le Saint et le grand Seigneur de gloire, le Roi éternel, lorsqu’il viendra visiter la terre, pour le bien[2]… (l’arbre de vie) sera planté du côté du nord, dans un lieu saint, près de la demeure du Seigneur, Roi éternel… Alors, je bénis le Dieu de gloire, le Roi éternel, parce qu’il avait préparé de pareilles (récompenses) aux hommes justes…[3].

Ce passage est extrêmement remarquable à cause de l’intervention personnelle de Dieu qui descendra sur la terre, mais il ne contient pas le terme de règne ou de royaume de Dieu pour désigner les temps du salut, et si la chose y est, sans le terme, l’auteur insiste avec intention sur le droit éternel de Dieu ; pourtant il faut convenir que les conditions de ce règne seront très surnaturelles, quoique sur la terre.

Le terme de royaume se trouve expressément, mais sans qualificatif, dans un autre endroit d’ailleurs assez obscur, et, à ce qu’il semble, dans le sens de la Sagesse, pour désigner la demeure des élus auprès de Dieu.

Ensuite, je vis tous les secrets des cieux, et comment le royaume sera partagé, et comment les actions des hommes seront pesées dans la balance[4].

Il est donc clair qu’aucun des auteurs du livre d’Hénoch n’a attaché d’importance spéciale au règne de Dieu. Ils ont employé, surtout dans les prières, les formules courantes sur le droit royal universel de Dieu, et, une fois seulement, fait allusion à la manifestation de ce règne parmi les hommes, et cela dans la partie la plus ancienne d’Hénoch.

Les Testaments des douze Patriarches se représentent le règne de Dieu de la même façon. Dieu viendra pour régner sur Israël ; c’est ce

  1. lxxxiv, 2 et 5.
  2. Cf. Mekilta sur Ex. xvii, 16 : « Quand Dieu s’assiéra sur le trône de sa royauté et que son règne sera ».
  3. xxv, 3. 5. 7 (Trad. Martin).
  4. xli, 1. Je ne sais pourquoi M. Boehmer n’a pas cité ce texte.