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où Hénoch est identifié avec le Métatron, cette création étrange de l’imagination théologique, qui représente Dieu auprès d’Israël et Israël auprès de Dieu. Comme on ne veut pas placer Hénoch sur le même trône que Dieu (σύνθρονος), on le place sur le trône inférieur (μετάθρονος), et cela rappelle bien ce trône du livre des Paraboles réservé à l’Élu ou Fils de l’homme : Hénoch « monta au ciel par le Verbe devant Dieu, et il le nomma Métatron, le grand scribe » [1].

Voilà donc à quoi aboutit en définitive, dans l’apocalypse juive, ce Messie céleste et transcendant. Ce n’est autre qu’Hénoch lui-même. Enlevé de terre sans avoir connu la mort, il avait eu le temps de connaître les secrets du ciel ; il jouissait ainsi d’une sorte de préexistence ou plutôt de survivance céleste qui laissait espérer son avènement au dernier jour. On s’écartait ainsi de plus en plus de la tradition prophétique dont les grandes images se réduisaient à une conception bizarre, destinée à tomber dans l’oubli.

  1. Ps.-Jon. sur Gen. iv, 24 : וסליק לרקיעא במימר קדם ה׳ וקרא שמיה מיטטרון ספרא רבא. On a proposé aussi comme étymologie de מיטטרון μετατύραννος. Il est sûr que la transcription de θ par ט n’est pas normale, mais le son ט a pu être amené par le ט précédent.