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française en bataille s’avança vers la place, pour en prendre possession au nom de Sa Majesté Très-Chrétienne ; tandis que les troupes anglaises rangées en bel ordre, en sortaient pour aller se renfermer jusqu’au lendemain dans les retranchements. Leur marche ne fut marquée par aucune contravention au droit des gens. Mais les sauvages ne tardèrent pas à y donner atteinte. Pendant le cérémonial militaire, qui accompagna la prise de possession, ils avaient pénétré en foule dans la place par les embrasures de canons pour procéder au pillage qu’on était convenu de leur livrer, mais ils ne s’en tinrent pas à piller : il était resté dans les casemates quelques malades, à qui leur état n’avait pas permis de suivre leurs compatriotes dans l’honorable retraite accordée à leur valeur. Ce furent là les victimes sur lesquelles ils se jetèrent impitoyablement, et qu’ils immolèrent à leur cruauté. Je fus témoin de ce spectacle. Je vis un de ces barbares sortir des casemates, où il fallait rien moins qu’une insatiable avidité de sang pour entrer, tant l’infection qui en exhalait était insupportable. Il portait à la main une tête humaine, d’où découlaient des ruisseaux de sang, et dont il fesait parade comme de la plus belle capture dont il eût pu se saisir.

Ce n’était là qu’un bien léger prélude de la cruelle tragédie du lendemain. Dès le grand matin les sauvages se rassemblèrent autour des retranchemens. Ils débutèrent par demander aux anglais les marchandises, provi-