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ils pussent assouvir leur faim plus que canine, en dévorant les tristes restes du cadavre de leur ennemi. J’ai déjà dit que nous étions trois missionnaires attachés au service des sauvages. Durant toute la campagne, notre logement fut commun, nos délibérations unanimes, nos démarches uniformes, et nos volontés parfaitement conformes. Cette intelligence ne servit pas peu à adoucir les travaux inséparables d’une course militaire. Après nous être concertés, nous jugeâmes tous que le respect dû à la majesté de nos mystères ne nous permettait pas de célébrer le sacrifice de l’Agneau sans tache dans le centre même de la barbarie. D’autant mieux que ces peuples adonnés aux plus bizarres superstitions, pouvaient abuser de nos plus respectables cérémonies, pour en faire la matière ou même la décoration de leurs jongleries. Sur ce fondement, nous abandonnâmes ce lieu proscrit par tant d’abominations, pour nous enfoncer dans les bois. Je ne pus faire ce mouvement sans me séparer tant soit peu de mes Abnakis. J’y étais autorisé, ce semble ; j’eus presque lieu cependant de regretter mon premier campement ; vous en jugerez par les suites. Je ne fus pas plutôt établi dans mon nouveau domicile, que je vis se renouveler dans les cœurs de mes Néophytes leur ardeur à s’approcher du Tribunal de la Pénitence. La foule, en grossit si fort, que j’avais peine à suffire à leur empressement. Ces occupations jointes aux autres devoirs de mon ministère, rempli-