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leur prêtait une volubilité qui apparemment n’aurait pas eu lieu sans cela. J’en visitai un dans un appartement du Fort, occupé par un de mes amis. Je lui donnai par signe les assurances les plus propres à le tranquiliser ; je lui fis présenter quelques rafraîchissemens, qu’il me parut recevoir avec reconnaissance.

Après avoir satisfait ainsi autant à ma compassion qu’aux besoins d’un malheureux, je vins hâter l’embarquement de mes gens ; il se fit sur l’heure. Le trajet n’était pas long. Deux heures suffirent pour nous rendre. La tente de M. le Chevalier de Lévi, était placée à l’entrée du camp. Je pris la liberté de présenter mes respects à ce Seigneur, dont le nom annonce le mérite, et dans qui le nom est ce qu’il y a de moins respectable. La conversation roulait sur l’action qui avait décidé du sort des cinq anglais, dont je viens de détailler la périlleuse aventure : j’étais bien éloigné d’en savoir les circonstances ; elles auront de quoi surprendre. Les voici.

M. de Corbiese, officier français, servant dans les troupes de la colonie, avait été commandé la nuit précédente pour aller croiser sur le Lac Saint-Sacrement. Sa troupe se montait environ à cinquante français, et à un peu plus de trois cens sauvages. Au premier point du jour, il découvrit un corps de trois cens anglais, détachés aussi en parti dans une quinzaine de Berges. Ces sortes de bateaux hauts de bord, et forts en épaisseur, en concurrence avec de frèles canots, compensaient