Page:Le massacre au Fort George - La mémoire de Montcalm vengée - 1864.djvu/34

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
— 33 —

ils le dardaient avec une adresse merveilleuse, et amenaient de gros esturgeons, sans que leurs petites nacelles, que le moindre mouvement irrégulier pouvait faire tourner, parussent pencher le moins du monde, ni à droite, ni à gauche ; il n’était pas nécessaire pour favoriser une pêche si utile, qu’on suspendît la marche. Le seul pêcheur cessait de marcher ; mais, en récompense, il était chargé de pourvoir à la subsistance de tous les autres, et il y réussissait. Enfin, après six jours de route, nous nous rendîmes au fort Vaudreuil, autrement nommé Carillon, où l’on avait assigné le rendez-vous général de nos troupes. À peine commençait-on à distinguer le sommet des fortifications, que nos sauvages se rangèrent en bataille, chaque nation sous son pavillon. Deux cents canots placés dans ce bel ordre, formaient un spectacle que messieurs les officiers français, accourus sur le rivage, ne jugèrent pas indigne de leur curiosité.

Dès que j’eus mis pied à terre, je m’empressai d’aller rendre mes devoirs à M. le Marquis de Montcalm, que j’avais eu l’honneur de connaître à Paris. Les sentiments dont il honore nos missionnaires, m’étaient connus. Il me reçut avec cette affabilité qui annonçait la bonté et la générosité de son cœur. Les Abnakis, moins pour se conformer au cérémonial que pour satisfaire à leurs inclinations et à leurs devoirs, ne tardèrent pas à se présenter chez leur Général. Leur Orateur le complimenta brièvement, comme on l’en avait