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chi au calme avec lequel je réglai toutes mes démarches, j’ai été bien des fois étonné. Ma force et ma jeunesse me permirent d’en culbuter quelques-uns et j’évitai avec adresse les lances d’autres assaillants. Enfin deux chefs herculéens des tribus les plus barbares à en juger par leur costume, me saisirent par chaque bras et se mirent à me pousser à travers la foule ; à leur force réunie, je ne pus résister.

Je me résignai alors à mon sort, convaincu que j’allais être égorgé et qu’ensuite ils avaleraient mon sang, car je me voyais entraîné à l’écart vers un marais à quelque distance. Mais avant que nous eussions fait quelques pas, un gentilhomme anglais de distinction, à en juger par les seuls vêtement qu’on lui avait laissés, sa culotte, qui était d’un velours écarlate fin, passa en courant près de nous.

Un des sauvages me lâcha de suite et se mettant à la poursuite du gentilhomme, s’efforça de le saisir, mais l’anglais étant plein de vigueur, le terrassa et eu pu probablement s’évader, si l’autre sauvage qui me tenait par le bras, ne m’eut laissé pour lui porter secours. J’utilisai l’occasion pour fuir et pour rejoindre un détachement de troupes anglaises, posté à quelque distance et non encore entamé ; mais avant que je me fusse beaucoup éloigné, je jettai les yeux à la hâte vers le gentilhomme, mon compatriote et je vis le sauvage lui enfoncer son casse-tête dans le dos ; puis je l’entendis rendre l’âme, ceci ajouta à mon désespoir et à la célérité de mes mouvements.