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des instruments modernes ; leurs résultats esthétiques ne peuvent du reste être méconnus un instant par ceux qui savent les appliquer.

Nous avons fait précédemment allusion à l’analogie existant entre les phénomènes visuels de la perspective qui nous font attribuer des dimensions moindres aux objets proportionnellement à leur éloignement, et les phénomènes tactiles de la variabilité de la sensibilité par lesquels nos représentations visuelles se rapetissent en raison de l’augmentation de notre sensibilité.

Il existe aussi une analogie remarquable entre ces phénomènes et ceux de l’esthétique musicale. Ces derniers peuvent en effet être comparés aux phénomènes de la perspective et à ceux de la sensibilité tactile, puisque l’esthétique musicale est basée sur la différenciation des sons. Les temps forts nous paraissent plus rapprochés, les temps faibles plus éloignés, et dans l’art de l’exécution toute beauté est évoquée par la proportionnalité établie dans cette perspective des sons. Cela est si vrai que le caractère communiqué à ces proportions distingue non seulement l’artiste de l’amateur inhabile ; il fait distinguer aussi les grands artistes entre eux, car celui qui aura établi ces diversifications à un degré supérieur, sera un plus grand artiste que les autres.

Quel outillage pourrait être plus merveilleusement approprié à produire ces phénomènes de diversification que les dix pulpes, dont nous avons cherché à démontrer l’extraordinaire variabilité fonctionnelle, afin de pouvoir mieux définir leurs rapports avec l’esthétique ?