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histoire d’abou-kir et d’abou-sir
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teinturerie, et à les interroger pour contrôler la vérité que j’avance ! » Et le roi, pour faire plaisir à Abou-Sir, bien que la preuve fût toute faite pour lui, fit mander le portier du khân et les apprentis ; et tous, après interrogatoire, confirmèrent les paroles du barbier en les aggravant encore par leurs révélations sur la conduite malhonnête du teinturier.

Alors le roi cria aux gardes : « Qu’on m’amène le teinturier, nu tête, nu pieds, et les mains liées derrière le dos ! » Et les gardes aussitôt coururent envahir le magasin du teinturier, qui était alors absent. Ils le cherchèrent donc dans sa maison, où ils le trouvèrent assis à savourer la jouissance des plaisirs tranquilles, et à rêver sans aucun doute à la mort d’Abou-Sir. Et donc ils se précipitèrent sur lui qui à coups de poing sur la nuque, qui à coups de pied dans le derrière, qui à coups de tête dans le ventre, et le piétinèrent et le dépouillèrent de ses vêtements, excepté de la chemise, et le traînèrent, nu pieds, nu tête et les mains liées derrière le dos, jusque devant le trône du roi. Et il vit Abou-Sir assis à droite du roi, et le portier du khân debout dans la salle avec, à ses côtés, les apprentis de la teinturerie. Il vit tout cela, en vérité ! Et de terreur il fit ce qu’il fit au milieu même de la salle du trône ; car il comprit qu’il était perdu sans recours. Mais déjà le roi, le regardant de travers, lui dit : « Tu ne peux nier que ce ne soit là ton ancien compagnon, le pauvre que tu as volé, dépouillé, maltraité, délaissé, battu, chassé, injurié, accusé et fait, en somme, mourir ! » Et le portier du khân et