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les mille nuits et une nuit

riant et plein de bonnes manières à l’égard des clients, et généreux à l’égard des pauvres gens dont il ne voulait jamais accepter d’argent. Et cette générosité fut d’ailleurs pour lui la cause de son salut, comme il sera prouvé dans le courant de cette histoire. Mais, dès maintenant, que l’on sache bien que ce salut lui viendra par l’entremise d’un capitaine marin qui, un jour, se trouva à court d’argent et put néanmoins prendre un bain tout à fait excellent, sans frais aucunement ! Et comme, en outre, il avait été rafraîchi de sorbets et accompagné jusqu’à la porte avec tous les égards possibles par Abou-Sir en personne, il se mit dès lors à réfléchir sur les moyens de prouver sa gratitude à Abou-Sir, soit par quelque cadeau soit autrement ! Et cette occasion il ne tarda pas à la trouver. Et voilà pour le capitaine marin !

Quant au teinturier Abou-Kir, il finit par entendre parler de ce hammam extraordinaire dont s’entretenait avec admiration toute la ville, en disant : « Certes ! c’est le paradis en ce monde ! » Et il résolut d’aller expérimenter par lui-même les délices de ce paradis, dont il ignorait encore le nom du gardien. Il se vêtit donc de ses plus beaux habits, monta sur une mule richement harnachée, se fit précéder et suivre par des esclaves armés de longs bâtons, et se dirigea vers le hammam. Arrivé à la porte, il sentit l’odeur du bois d’aloès et le parfum du nadd ; et il vit la multitude des gens qui entraient et qui sortaient, et ceux qui étaient assis sur les bancs à attendre leur tour, fussent-ils d’entre les grands notables, ou d’entre les plus pauvres des pauvres, ou les