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la soirée d’hiver d’ishak de mossoul
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soie verte, et sur sa tête était tendue une étoffe d’or qui n’avait pu la garantir de la pluie et de l’eau déversée par les gouttières des terrasses. Du reste, elle avait dû plonger dans la boue tout le long du chemin, comme ses jambes l’attestaient clairement. Et moi, la voyant dans un tel état, je m’exclamai : « Ô ma maîtresse, pourquoi t’exposer ainsi dehors, et par une pareille nuit ! » Elle me dit, de sa voix gentille : « Hé ! pouvais-je ne point m’incliner devant le souhait que tout à l’heure chez moi m’a transmis ton messager ? Il m’a dit la vivacité de ton désir à mon égard, et, malgré cet affreux temps, me voici ! »

Or moi, bien que ne me souvenant point d’avoir donné un ordre pareil, et l’eussé-je donné que mon unique esclave n’eût pu l’exécuter dans le même temps qu’il était demeuré près de moi, je ne voulus point montrer à mon amie combien bouleversé était mon esprit de tout cela ; et je lui dis : « Louange à Allah qui permet notre réunion, ô ma maîtresse, et qui change en miel l’amertume du désir ! Que ta venue parfume la maison et repose le cœur du maître de la maison ! En vérité, si tu n’étais venue, je serais allé moi-même à ta recherche, tant ce soir mon esprit travaillait à ton sujet…

— À ce moment de sa narration, Schahrazade vit apparaître le matin et, discrète, se tut.