Page:Le livre des mille nuits et une nuit, Tome 9, trad Mardrus, 1902.djvu/232

Cette page a été validée par deux contributeurs.
220
les mille nuits et une nuit

Or, comme ils étaient au soir du quarantième jour, la magicienne Almanakh, après un nombre infini d’assauts divers avec Sourire-de-Lune, fut plus agitée que de coutume et s’étendit pour dormir. Mais vers minuit, Sourire-de-Lune, qui feignait de dormir, la vit se lever du lit, avec un visage enflammé. Et elle alla au milieu de la salle où elle prit, dans un plateau de cuivre, une poignée de grains d’orge qu’elle jeta dans l’eau du bassin. Et, au bout de quelques instants, les grains d’orge germèrent, et leurs tiges sortirent de l’eau, et leurs épis mûrirent et se dorèrent. Alors la magicienne recueillit les grains nouveaux, les pila dans un mortier de marbre, y mélangea certaines poudres qu’elle tira de différentes boites, et en fit une pâte arrondie comme un gâteau. Puis elle mit le gâteau ainsi préparé sur la braise d’un réchaud et le fit cuire lentement. Alors elle le retira, l’enveloppa dans une serviette et alla le cacher dans une armoire, après quoi elle revint se coucher dans le lit à côté de Sourire-de-Lune, et s’endormit.

Mais le matin, Sourire-de-Lune, qui, depuis son entrée dans le palais de la magicienne, avait oublié le vieux cheikh Abderrahmân, se souvint de lui à propos et pensa qu’il était nécessaire d’aller le trouver pour le mettre au courant de ce qu’il avait vu faire à Almanakh pendant la nuit. Et il alla à la boutique du cheikh qui fut ravi de le revoir, l’embrassa avec effusion, le fit s’asseoir et lui demanda : « J’espère, mon fils, que tu n’as pas eu à te plaindre de la magicienne Almanakh, tout infidèle qu’elle soit ! » Il répondit : « Par Allah, mon bon oncle, elle m’a traité tout ce temps avec beaucoup délicatesse, et