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histoire de fleur-de-grenade…
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laissait conduire sans montrer d’aucune manière ses sentiments.

Et la magicienne Almanakh, qui sentait ses entrailles brûler pour cet adolescent bien plus qu’elles n’avaient jamais brûlé pour ses amants passés, se hâta de le conduire dans une salle dont les murs étaient bâtis en or, et dont l’air était rafraîchi par un jet d’eau jaillissant d’un bassin de turquoise. Et elle alla se jeter avec lui sur un grand lit d’ivoire où elle commença par le caresser d’une façon si extraordinaire qu’il se mit à chanter et à danser de tous ses oiseaux ! Et elle n’était pas brutale du tout, au contraire ! Si délicate vraiment ! Aussi ! incalculables furent les saillies du coq sur l’infatigable poularde ! Et il se dit : « Par Allah ! elle est infiniment experte ! Et elle ne me bouscule pas ! Elle prend son temps, et moi également ! Aussi, comme je pense bien qu’il est impossible que la princesse Gemme soit aussi merveilleuse que cette enchanteresse, je veux rester ici toute ma vie, et ne plus penser ni à la fille de Salamandre, ni à mes parents, ni à mon royaume ! »

Et, de fait, il resta là quarante jours et quarante nuits, passant tout son temps avec la jeune magicienne, en festins, danses, chants, caresses, mouvements, assauts, copulations, et autres choses semblables, à la limite du plaisir et de la jubilation.

Et de temps en temps, pour rire, Almanakh lui demandait : « Ô mon œil, te trouves-tu mieux avec moi qu’avec ton oncle, dans la boutique ? » Et il répondait : « Par Allah ! ô ma maîtresse, mon oncle est un pauvre vendeur de drogues, mais toi tu es la thériaque même ! »