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histoire de fleur-de-grenade…
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tes yeux, l’esclave captif de ta beauté ! » Et l’adolescente, comme ravie, s’écria : « Ya Allah ! ô mon maître, c’est donc toi le beau Sourire-de-Lune, neveu de Saleh et fils de la reine Fleur-de-Grenade ? » Il dit : « Mais oui ! descends, je t’en prie ! » Elle dit : « Ô ! que mon père a donc été peu sage de refuser pour sa fille un époux tel que toi ! Que pouvait-il souhaiter de mieux ? Et où pouvait-il trouver un prince plus beau et plus charmant, sur la terre ou sous les mers ! Ô mon chéri, ne blâme pas trop le refus irréfléchi de mon père, car moi je t’aime ! Et si toi tu m’aimes grand comme un empan, moi je t’aime gros comme le bras ! Dès que je t’ai vu, l’amour que tu as pour moi s’est transporté dans mon foie, et je suis devenue la victime de ta beauté ! »

Et, après avoir prononcé ces paroles, elle se laissa glisser de l’arbre dans les bras de Sourire-de-Lune qui, à la limite de la jubilation, la serra contre sa poitrine et la dévora partout de baisers, alors qu’elle lui rendait caresse pour caresse et mouvement pour mouvement. Et Sourire-de-Lune, à ce contact délicieux, sentit son âme chanter de tous ses oiseaux, et s’écria : « Ô souveraine de mon cœur, ô princesse Gemme tant désirée, toi pour qui j’ai délaissé moi aussi mon royaume, ma mère et le palais de mes pères, certes ! mon oncle Saleh ne m’a détaillé que le quart à peine de tes charmes, alors que les trois autres quarts restent pour moi encore insoupçonnés ! Et il n’a pesé devant moi de ta beauté qu’un carat sur vingt-quatre carats, ô toute d’or ! » Et, ayant dit ces paroles, il continua à la couvrir de baisers, et à la caresser de mille manières. Puis, brûlant de