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les mille nuits et une nuit

qu’elle appartenait à une adolescente comme la lune. Et il pensa : « Par Allah ! je vais tout de suite monter l’attraper et lui demander son nom ! Car elle ressemble étrangement au portrait admirable que m’a fait mon oncle Saleh de la princesse Gemme ! Et qui sait si ce n’est point elle-même ? Elle a dû peut-être prendre la fuite du palais de son père, dès le début du combat ! » Et, ému à l’extrême, il sauta sur ses pieds et, se tenant debout au-dessous de l’arbre, il leva les yeux vers l’adolescente et lui dit : « Ô but suprême de tout désir, qui es-tu et pour quel motif te trouves-tu dans cette île, au haut de cet arbre ? » Alors la princesse se pencha un peu vers le bel adolescent et lui sourit, et dit d’une voix chantante comme l’eau : « Ô charmant jouvenceau, ô très beau, je suis la princesse Gemme, fille du roi Salamandre le marin ! Et je suis ici, car j’ai fui ma patrie, et les demeures de la patrie, et mon père et ma famille, pour échapper au triste sort des vaincus ! Car le prince Saleh, à l’heure qu’il est, a dû réduire mon père en esclavage après avoir massacré tous ses gardes. Et il doit me chercher partout dans le palais ! Hélas ! hélas ! Ô dur exil loin des miens ! Ô malheureux sort du roi mon père ! Hélas ! hélas ! » Et de grosses larmes tombèrent de ses beaux yeux sur le visage de Sourire-de-Lune, qui levait les bras en l’air d’émotion et de saisissement, et qui finit par s’écrier : « Ô princesse Gemme, âme de mon âme, ô rêve de mes nuits sans sommeil, descends, de grâce ! de cet arbre, car je suis le roi Sourire-de-Lune fils de Fleur-de-Grenade, la reine native, comme toi, de la mer ! Ô ! descends, car je suis l’assassiné de