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les mille nuits et une nuit

Fleur-de-Grenade et du roi Sourire-de-Lune, et ils le pleurèrent un mois entier sans voir personne, et lui élevèrent un tombeau digne de sa mémoire auquel furent attachés des biens de mainmorte au bénéfice des pauvres, des veuves et des orphelins.

Et, pendant cet intervalle, ne manquèrent pas d’arriver, pour prendre part à l’affliction générale, la grand’mère, dame Sauterelle, et l’oncle du roi, le prince Saleh, et les tantes du roi, natives de la mer. Et, d’ailleurs, ils étaient déjà venus plusieurs fois visiter leurs parents, du vivant du vieux roi. Et ils pleurèrent beaucoup de n’avoir pu assister à ses derniers moments. Et ils mirent tous leur douleur en commun ; et ils se consolaient mutuellement à tour de rôle ; et ils finirent, au bout d’un très longtemps, par faire un peu oublier au roi la mort de son père, et le décidèrent à reprendre ses séances au diwân et à s’occuper des affaires de son royaume. Et il les écouta et consentit, après bien des résistances, à revêtir de nouveau ses habits royaux ouvragés d’or et constellés de pierreries, et à ceindre le diadème. Et il reprit en main l’autorité et rendit la justice, avec l’approbation universelle et le respect des grands et des petits ; et cela pendant encore une année.

Or, un après-midi, le prince Saleh, qui depuis un certain temps, n’était pas revenu voir sa sœur et son neveu, sortit de la mer et entra dans la salle où se tenaient à ce moment la reine et Sourire-de-Lune. Et il leur fit ses salams, et les embrassa ; et Fleur-de-Grenade lui dit : « Ô mon frère, comment vas-tu, et comment va ma mère, et comment vont mes cousines ? » Il répondit : « Ô ma sœur, elles vont très