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histoire de fleur-de-grenade…
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et oncle de Sourire-de-Lune, prit le petit dans ses bras, et se mit à le baiser et à le caresser de mille manières, en le promenant par la chambre et en le tenant en l’air dans ses mains ; et soudain il prit son élan et, du haut du palais, sauta dans la mer, où il plongea et disparut avec le petit.

À cette vue, le roi Schahramân, saisi d’épouvante et de douleur, se mit à pousser des cris désespérés et à se donner de si grands coups sur la tête qu’il en faillit mourir. Mais la reine Fleur-de-Grenade, loin de se montrer effrayée ou affligée de la chose, dit au roi d’un ton assuré : « Ô roi du temps, ne te désespère pas pour si peu de chose, et sois sans aucune crainte au sujet de ton fils ! car moi, qui certainement aime cet enfant bien plus que toi, je suis tranquille, le sachant avec mon frère qui, s’il savait que le petit devait avoir la moindre incommodité ou prendre froid ou seulement être mouillé, n’aurait pas fait ce qu’il vient de faire. Sois sûr que l’enfant ne court aucun risque ni danger du côté de la mer, quoiqu’il soit à demi de ton sang ! Mais à cause de l’autre moitié qu’il tient de mon sang, il peut impunément vivre dans l’eau, comme sur la terre. Ne sois donc plus alarmé, et sois, en outre, persuadé que mon frère ne va pas tarder à revenir avec l’enfant en bonne santé ! » Et la reine Sauterelle et les jeunes tantes de l’enfant confirmèrent au roi les paroles de son épouse. Mais le roi ne commença à se calmer que lorsqu’il vit la mer se troubler et s’agiter et que, de son sein entr’ouvert, sortit, tenant le petit dans ses bras, le prince Saleh qui s’éleva dans les airs, d’un saut, et rentra dans la salle haute par la même fenêtre d’où il était sorti. Et