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les mille nuits et une nuit

« Et depuis lors, accompagné de dix personnes pour m’aider dans mes recherches, je parcours tous les pays de la terre dans le but de trouver, chez quelque marchand ou chez quelque vendeur ou passant, une amulette de ces amulettes que savait seul douer de vertus guérisseuses et exorcisantes le cheikh Saadallah de Babylone. Et le sort a voulu te mettre sur ma voie, et me faire trouver et acheter dans ta boutique cet objet que je désespérais déjà de retrouver jamais ! »

« Puis, ô mes hôtes, l’étranger, après m’avoir raconté cette histoire, serra sa ceinture et s’en alla.

« Et telle est, comme je vous l’ai déjà dit, la cause de la couleur jaune de mon visage !

« Quant à moi, je réalisai en argent tout ce que je possédais, en vendant ma boutique, et, riche désormais, je partis en toute hâte pour Baghdad, où, dès mon arrivée, je volai au palais du vieillard blanc, père de ma bien-aimée. Car, depuis ma séparation d’avec elle, le jour et la nuit elle remplissait mes pensées ; et la revoir était le but de mes désirs et de ma vie. Et l’absence n’avait fait qu’attiser les feux de mon âme et exalter mon esprit.

« Je m’informai donc d’elle auprès d’un jeune garçon qui gardait la porte d’entrée. Et le jeune garçon me dit de lever la tête et de regarder. Et je vis que la maison tombait en ruines, que la fenêtre où d’ordinaire se tenait ma bien-aimée était arrachée, et qu’un air de tristesse et de profonde désolation régnait sur la demeure. Alors les larmes me vinrent aux yeux, et je dis au petit esclave : « Qu’a donc fait Allah au cheikh Taher, ô mon frère ? » Il me répon-