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les mille nuits et une nuit

« Or Allah m’écrivit une heureuse traversée et j’arrivai sain et sauf, avec mes richesses, à Bassra, d’où, ayant pris place sur un autre navire, je remontai le Tigre jusqu’à Baghdad. Là je m’informai de l’endroit le plus convenable à habiter, et l’on m’indiqua le quartier Karkh comme étant le quartier le mieux fréquenté et la résidence habituelle des personnages importants. Et j’allai à ce quartier et je louai une belle maison dans la rue Zaafarân, où je fis transporter mes richesses et mes effets. Après quoi je fis mes ablutions et, l’âme réjouie et la poitrine dilatée de me trouver enfin dans l’illustre Baghdad, but de mes désirs et envie de toutes les villes, je m’habillai de mes plus beaux vêtements et sortis me promener à l’aventure à travers les rues les plus fréquentées.

« Or, ce jour-là était précisément le vendredi, et tous les habitants étaient en tenue de fête et se promenaient comme moi, en respirant l’air frais du dehors. Et moi je suivais la foule et me portais là où elle se portait. Et j’arrivai de la sorte à Karn-al-Sirat, le but habituel des promeneurs de Baghdad. Et je vis, à cet endroit, entre divers édifices fort beaux, une bâtisse plus belle que les autres et dont la façade donnait sur le fleuve. Et sur le seuil de marbre je vis un vieillard assis et vêtu de blanc qui était bien vénérable d’aspect, avec une barbe blanche qui lui descendait jusqu’à la ceinture en se divisant en deux touffes égales de filigrane d’argent. Et il était entouré de cinq adolescents beaux comme des lunes, et parfumés comme lui d’essences choisies.

« Alors moi, gagné par la belle physionomie du vieillard blanc et par la beauté des adolescents, je