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les mille nuits et une nuit

jusqu’à la toucher avec les doigts à plusieurs reprises, tant elle les intriguait et les amusait. Et ils riaient entre eux de cela, et disaient : « C’est un Sans-Queue ! » et ils dansaient de joie ! Aussi Abdallah de la Terre finit-il par se formaliser de leurs façons et de leur sans-gêne, et dit à Abdallah de la Mer : « Ô mon frère, m’aurais-tu conduit jusqu’ici pour faire de moi la risée de tes enfants et de ton épouse ? » Il répondit : « Je te demande bien pardon, ô mon frère, et je te prie de m’excuser, et de ne point prêter attention aux manières de ces deux femmes et de ces deux enfants, car leur intelligence est défectueuse ! » Puis il se tourna vers ses enfants et leur cria : « Taisez-vous ! » Et ils eurent peur de lui, et se turent. Alors le Maritime dit à son hôte : « Ne t’étonne pourtant pas trop de ce que tu vois, ô mon frère, car chez nous celui qui n’a pas de queue ne compte pas ! »

Or, comme il achevait ces paroles, arrivèrent dix individus grands, gros et vigoureux, qui dirent au maître de la maison : « Ô Abdallah, le roi de la Mer vient d’apprendre que tu as reçu chez toi un Sans-Queue d’entre les Sans-Queue de la Terre. Est-ce vrai ? » Il répondit : « C’est vrai. Et c’est celui-ci même que vous voyez devant vous. Il est mon ami et mon hôte, et je vais à l’instant le reconduire sur le rivage où je l’ai pris ! » Ils dirent : « Garde-toi de le faire ! Car le roi nous a envoyés le chercher, vu qu’il désire le voir et examiner comment il est fait ! Et il paraît qu’il a quelque chose d’extraordinaire à l’arrière, et quelque chose de plus extraordinaire encore à l’avant ! Et le roi voudrait voir les