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les mille nuits et une nuit

dans les jours noirs, et lui dit : « Ô mon frère, la bonne chance et la fortune commencent enfin à marcher sur notre route ! Je te prie donc de faire le compte de tout ce que je te dois. » Le boulanger répondit : « Un compte ? Et pourquoi faire ? Avons-nous besoin de cela, entre nous ? Mais si vraiment tu as de l’argent de trop, donne-moi ce que tu peux ! Et si tu n’as rien, prends autant de pains qu’il t’en faut pour nourrir ta famille, et attends, pour me payer, que la prospérité réside chez toi définitivement ! » Le pêcheur dit : « Ô mon ami, la prospérité s’est installée solidement chez moi, pour le bonheur de mon nouveau-né, par la bonté et la munificence d’Allah ! Et tout ce que je pourrai te donner sera bien peu en comparaison de ce que tu as fait pour moi, quand me tenait à la gorge la misère ! Mais prends ceci en attendant ! » Et il plongea sa main dans son sein et en retira une grosse poignée de pierreries, si grosse même qu’il ne lui resta pour lui que la moitié à peine de ce que lui avait donné le Maritime. Et il la remit au boulanger, en lui disant : « Je te demande seulement de me prêter quelque argent, en attendant que j’aie vendu au souk ces gemmes de la mer. » Et le boulanger, stupéfait de ce qu’il voyait et recevait, vida son tiroir entre les mains du pêcheur et voulut lui-même lui porter jusqu’à sa maison la charge de pain nécessaire pour la famille. Et il lui dit : « Je suis ton esclave et ton serviteur ! » Et, bon gré mal gré, il prit sur sa tête la hotte de pains et marcha derrière le pêcheur jusqu’à sa maison, où il déposa la hotte. Et il s’en alla après lui avoir baisé les mains. Quant au pêcheur, il