Page:Le livre des mille nuits et une nuit, Tome 8, trad Mardrus, 1901.djvu/84

Cette page a été validée par deux contributeurs.
76
les mille nuits et une nuit

assistants le perdirent de vue au bout de peu d’instants.

En voyant ainsi disparaître son fils et en ne le voyant plus revenir au bout de quelques heures d’attente, le roi Sabour fut bien inquiet et bien perplexe et dit au Persan : « Ô savant, comment allons nous faire maintenant pour qu’il revienne ? » Il répondit : « Ô mon maître, moi je n’y puis plus rien ; et toi tu ne reverras ton fils qu’au jour de la Résurrection ! En effet, au lieu de me donner le temps de lui expliquer la façon de se servir de la cheville de gauche, qui est la cheville de la descente, le prince n’a voulu écouter que sa suffisance et son ignorance, et a fait partir le cheval trop vite ! »

Lorsque le roi Sabour eut entendu ces paroles du savant, il fut plein de fureur et, enrageant à la limite de la rage, il ordonna aux esclaves de lui donner la bastonnade et de le jeter ensuite dans le cachot le plus noir, tandis que lui-même arrachait sa couronne de sur sa tête, se donnait de grands coups sur la figure et s’arrachait la barbe. Après quoi il se retira dans son palais, en fit fermer toutes les portes, et se mit à sangloter, à gémir et à se lamenter, lui, son épouse, ses trois filles, ses gens et tous les habitants du palais ainsi que ceux de la ville. Et de la sorte leur joie se changea en affliction, et leur félicité en tristesse et en désespoir. Et voilà pour eux !

Quant au prince, le cheval continua à s’élever avec lui dans les airs sans s’arrêter, tellement qu’il fut sur le point de toucher au soleil. Alors il comprit le péril qu’il courait et quelle mort affreuse l’attendait dans ces régions du ciel ; et il fut bien inquiet