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les mille nuits et une nuit

palais et, au moyen de solides étoffes de Baalbek auxquelles elle s’attacha soigneusement, elle se glissa du haut des murs jusqu’à terre. Et, vêtue comme elle était de ses plus belles robes et le cou orné d’un collier de pierreries, elle traversa les plaines désertes qui entouraient le palais et arriva de la sorte au bord de la mer.

Là elle aperçut un pêcheur, que le vent du large avait jeté le long de cette côte, en train de pêcher, assis dans sa barque. Le pêcheur aperçut également Rose-dans-le-Calice et, croyant à quelque apparition d’éfrit, eut bien peur et se mit à manœuvrer pour s’éloigner de là au plus vite. Alors Rose-dans-le-Calice l’appela à plusieurs reprises et, tout en lui faisant de nombreux signes, elle lui récita ces vers :

« Ô pêcheur ! calme ton trouble, car je suis un être humain semblable à tous les autres !

« Je te demande de répondre à mes prières et d’écouter ma très véridique histoire.

« Aie pitié de moi et Allah te préservera des ardeurs dont je brûle, s’il t’arrive un jour de jeter les yeux sur un ami farouche et sans pitié,

« Car j’aime un jouvenceau dont le visage resplendissant fait pâlir l’éclat du soleil et de la lune,

« Dont les regards ont fait s’écrier la gazelle elle-même, en s’excusant : « Je suis son esclave ! »

« La beauté a écrit sur son front cette ligne charmante au sens concis :

« Quiconque le regarde comme le flambeau de l’amour entre dans la voie droite ; mais quiconque s’en écarte commet une faute grave et une impiété.