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les mille nuits et une nuit

Le soir, à l’heure du repas, Jouder prit le sac et en tira quarante espèces de plats que sa mère rangea l’un après l’autre sur la nappe ; puis il invita ses frères à entrer manger. Et lorsqu’ils eurent fini, il leur tira des pâtisseries pour qu’ils s’en dulcifiassent ; et ils s’en dulcifièrent. Alors il leur dit : « Prenez les restes de notre repas et distribuez-les aux pauvres et aux mendiants ! » Puis le lendemain il leur servit d’aussi splendides repas ; et il en fut de même pendant dix jours consécutifs.

Or, au bout de ce temps, Salem dit à Salim : « Comprends-tu, toi, comment fait notre frère pour nous servir de si splendides repas tous les jours, une fois le matin, une fois à midi, une fois le soir, et une fois des pâtisseries pendant la nuit ? Vraiment les sultans ne font point autrement ! D’où ont pu lui venir une telle fortune et tant d’opulence ? Et nous ne nous demandons point d’où il tire tous ces mets étonnants et ces pâtisseries, alors que nous ne le voyons acheter jamais rien, ni allumer de feu, ni s’occuper de la cuisine, ni posséder de cuisinier ! » Et Salim répondit : « Par Allah ! je n’en sais rien ! Mais connais-tu, toi, quelqu’un qui puisse nous renseigner sûr la vérité de cette affaire-là ? » Il dit : « Seule notre mère pourra nous renseigner à ce sujet ! » Et à l’instant ils imaginèrent une ruse et entrèrent chez leur mère, pendant l’absence de leur frère, et lui dirent : « Ô notre mère, nous avons bien faim ! » Elle répondit : « Réjouissez-vous, car vous allez tout de suite être satisfaits ! » Et elle entra dans la salle où se trouvait le sac, plongea la main dans le sac en demandant au serviteur quelques mets bien chauds,