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histoire de jouder le pêcheur…
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il attacha les bras du Moghrabin qui lui disait : « Plus solidement encore ! » et, lorsqu’il eut bien fait la chose, il le souleva et le jeta dans le lac. Puis il attendit quelques instants pour voir ce qui allait arriver.

Or, au bout d’un certain temps, il vit soudain sortir et émerger de l’eau les deux pieds à la fois du Moghrabin.

Alors il comprit que l’homme était mort, et, sans plus s’inquiéter de lui, il prit la mule et alla au souk des marchands où, de fait, il vit le Juif en question assis sur une chaise à l’entrée de sa boutique, et qui, à la vue de la mule, s’écria : « Il n’y a plus de doute ! L’homme a péri ! » Puis il ajouta : « Il a péri victime de son avidité ! » Et, sans ajouter un mot, il prit la mule des mains de Jouder, et lui compta cent dinars d’or, en lui recommandant de garder le secret.

Jouder prit donc l’argent du Juif, et se hâta d’aller trouver le boulanger auquel il prit du pain comme à l’ordinaire, et, lui tendant un dinar, lui dit : « Voici pour te payer ce que je te dois, ô mon maître ! » Et le boulanger fit son compte et lui dit : « Il te reste chez moi du pain pour deux jours ! » Et Jouder le quitta et alla trouver le boucher et le vendeur de légumes et, leur donnant à chacun un dinar, leur dit : « Donnez-moi ce qu’il me faut, et gardez chez vous, en compte, le reste de l’argent ! » Et il prit la viande et les légumes, et porta le tout à la maison, où il trouva ses frères bien affamés et sa mère qui leur disait de prendre patience jusqu’au retour de leur frère. Alors il mit devant eux les provisions, sur lesquelles ils se précipitèrent comme des