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les mille nuits et une nuit

accompagné de Dos-de-Chameau, alla ouvrir la porte à Dalila qui entra, le visage souriant, et salua toute l’assistance.

Or, justement Hassan-la-Peste, Ahmad-la-Teigne et les autres étaient à ce moment assis par terre autour de la nappe, et prenaient leur repas composé de pigeons rôtis, de radis et de concombres. Aussi lorsque Dalila fut entrée, la Peste et la Teigne se levèrent en son honneur et lui dirent : « Ô vieille pleine de spiritualité, notre mère, assieds-toi manger avec nous de ces pigeons ! Nous t’avons laissé de côté ta part du festin ! » À ces paroles Dalila sentit le monde noircir devant son visage et s’écria : « N’est-ce point une honte sur vous tous de voler et rôtir les pigeons que le khalifat préfère à ses propres enfants ! » Ils répondirent : « Et qui donc a volé les pigeons du khalifat, ô notre mère ? » Elle dit : « C’est cet Égyptien Ali Vif-Argent ! » Celui-ci répondit : « Ô mère de Zeinab, lorsque j’ai fait rôtir ces pigeons je ne savais point qu’ils étaient messagers ! En tout cas, voici celui qui te revient ! » Et il lui offrit un des pigeons rôtis. Alors Dalila prit un morceau de l’aile du pigeon, le porta à ses lèvres, le goûta un instant et s’écria : « Par Allah ! mes pigeons vivent encore ! car ce n’est point là de leur chair ! Moi je les avais nourris avec du grain mélangé de musc, et je les reconnaîtrais à l’odeur et au goût qu’ils en ont conservé ! »

À ces paroles de Dalila, toute l’assistance se mit à rire, et Hassan-la-Peste lui dit : « Ô notre mère, tes pigeons sont en sûreté chez moi ! Et je veux bien consentir à te les rendre, mais à une condition ! »