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dalila-la-rouée… (ali vif-argent…)
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miel et au safran, et un plateau de grains de grenade aux amandes décortiquées, au sucre et aux fleurs ! » Ali lui demanda : « Et comment leur sers-tu leurs repas d’ordinaire à tes maîtresses ? » Il répondit : « Je leur sers leur nappe à chacune à part. » Il demanda : « Et les quarante nègres ? » Il dit : « Je leur donne des fèves cuites à l’eau et sautées au beurre et aux oignons, et, comme boisson, une cruche de bouza ! C’est assez pour eux ! » Il demanda : « Et les chiens ? » Il dit : « À ceux-là, je leur donne trois onces de viande à chacun, et les os qui restent du repas de mes maîtresses ! »

Lorsque Vif-Argent eut ces divers renseignements, il mélangea prestement du bang avec la boisson du cuisinier qui, l’ayant absorbée, s’écroula sur le sol comme un buffle noir. Alors Vif-Argent s’empara des clefs qui pendaient à un clou, et reconnut la clef de la cuisine aux pelures d’oignons et aux plumes qui y étaient collées, et la clef de la dépense à l’huile et au beurre qui l’enduisaient. Et il alla prendre ou acheter toutes les provisions qu’il lui fallait et, guidé par le chat du cuisinier qui, lui-même, fut trompé par la ressemblance d’Ali avec son maître, il circula par tout le khân, comme s’il l’habitait depuis son enfance, cuisina les mets, tendit les nappes, et servit à manger à Dalila, à Zeinab, aux nègres et aux chiens, après avoir mélangé le bang à leur nourriture, sans que personne pût s’apercevoir du changement de cuisine ou de cuisinier.

Tout cela !

Quand Vif-Argent vit que tout le monde dans le khân était endormi sous l’effet du soporifique, il