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rose-dans-le-calice et délice-du-monde
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ser l’aventure en te chargeant de leurs missives et en leur rendant toutes sortes de services avec une grande discrétion, si tu veux bénéficier sûrement d’une énorme quantité d’avantages ! » Or moi, ô ma maîtresse, je te raconte là ce que j’ai vu ! À toi maintenant la décision ! » Rose-dans-le-Calice répondit : « Ô nourrice, te sens-tu vraiment capable de taire les secrets ? » Elle dit : « Peux-tu en douter un instant, alors que je suis une essence d’entre les essences des cœurs d’élection ? » L’adolescente alors n’hésita plus, lui exhiba le papier sur lequel elle avait écrit les vers et le lui remit en disant : « Hâte-toi de porter ceci à Délice-du-Monde et de me rapporter la réponse ! » La nourrice aussitôt se leva et se rendit chez Délice-du-Monde dont elle commença par baiser la main, pour ensuite le complimenter avec les expressions les plus gentilles et les plus courtoises. Après quoi elle lui remit le billet. Délice-du-Monde déplia le papier et le lut. Puis, lorsqu’il eut bien compris la portée du contenu, il écrivit sur le revers du feuillet les vers suivants :

Mon cœur, que l’amour exalte, bat passionnément, et je comprime ses élans tumultueux, mais en vain ! Mon état dévoile mes sentiments !

Si mes larmes débordent, je dis à mon censeur : « C’est l’effet d’un mal aux yeux ! » Je pense ainsi lui donner le change sur le vrai motif et lui cacher mes intimités.

Libre de tous les liens hier encore, et le cœur tranquille, je ne savais point l’amour ! Je me réveille avec le cœur dominé par l’amour.