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rose-dans-le-calice et délice-du-monde
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Cette improvisation terminée, Rose-dans-le-Calice prit une feuille de papier et y transcrivit les vers, soigneusement. Elle la plia ensuite et la mit dans un sachet de soie brodé d’or qu’elle cacha sous le coussin du divan.

Or, la vieille nourrice, qui avait observé ces divers mouvements de sa maîtresse, se mit à causer avec elle de choses et d’autres jusqu’à ce qu’elle l’eût endormie. Alors elle tira doucement la feuille de dessous le coussin, la lut et, s’étant ainsi assurée de la passion de Rose-dans-le-Calice, la remit à la même place. Puis, une fois l’adolescente réveillée, elle lui dit : « Ô ma maîtresse, je suis pour toi la meilleure et la plus tendre des conseillères ! Je tiens donc à te dire combien violente est la passion d’amour, et à te prévenir que, lorsqu’elle se concentre dans un cœur sans pouvoir s’en épancher, elle le fait fondre, fût-il d’acier, et occasionne dans le corps bien des maladies et des infirmités. Au contraire, si la personne qui souffre de ce mal d’amour le divulgue à une autre, elle ne pourra qu’en tirer du soulagement ! »

En entendant ces paroles de sa nourrice, Rose-dans-le-Calice dit : « Ô nourrice, connaîtrais-tu le remède de l’amour ? » Elle répondit : « Je le connais. C’est de jouir de celui qui en est l’objet ! » Elle demanda : « Et comment fait-on pour arriver à cette jouissance ? » Elle dit : « Ô ma maîtresse, pour cela on n’a d’abord qu’à échanger des lettres pleines de paroles gentilles, de salutations et de compliments ; car c’est là le meilleur moyen qu’ont deux amis de se réunir, et c’est la première chose à faire pour ré-