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les mille nuits et une nuit

À cette vue, le barbier, à la limite de la fureur, se précipita dans l’arrière-boutique et, prenant l’ânier à la gorge, le secoua comme une hotte et lui cria ; « Où est ta mère, l’entremetteuse ! » Le pauvre ânier, fou de douleur et de rage, lui dit : « Ah ! fils de mille chiffons ! Ma mère ? Mais elle est dans la paix d’Allah ! » Il le secoua encore et lui cria : « Où est ta mère, la vieille putain qui t’a conduit ici, et qui est partie après m’avoir volé toute la boutique ? » L’ânier, le corps agité de tremblements, allait répondre quand soudain entrèrent dans la boutique, revenant de leurs recherches infructueuses, les trois autres dupes : le teinturier, le jeune marchand et le Juif. Et ils virent aux prises le barbier, les yeux hors de la tête, et l’ânier, les tempes cautérisées et gonflées de deux larges ampoules et les lèvres écumantes de sang avec, de chaque côté, les deux molaires encore pendantes au dehors. Alors ils s’écrièrent : « Qu’y a-t-il donc ? » Et l’ânier, de tout son gosier, s’exclama : « Ô musulmans, justice contre cet enculé ! » Et il leur raconta ce qui venait d’arriver. Alors ils demandèrent au barbier : « Pourquoi as-tu fait cela à cet ânier, ô maître Mass’oud ? » Et le barbier leur raconta à son tour comment sa boutique venait d’être nettoyée par la vieille. Alors ils ne doutèrent plus que ce fût la vieille qui eût encore accompli ce nouveau forfait, et s’écrièrent : « Par Allah ! c’est la vieille maudite qui est la cause de tout cela ! » Et tous finirent par s’expliquer et tomber d’accord là-dessus. Alors le barbier se hâta de fermer sa boutique et de se joindre aux quatre dupes pour les aider dans leurs recherches. Et le pauvre ânier ne cessait de gein-