Page:Le livre des mille nuits et une nuit, Tome 8, trad Mardrus, 1901.djvu/146

Cette page a été validée par deux contributeurs.
138
les mille nuits et une nuit

baise-lui la main, et dis-lui : « Ma maîtresse Khatoun te prie de laisser entrer chez nous cette sainte vieille pour qu’elle nous obtienne les grâces d’Allah ! » Et la servante descendit trouver le portier et lui baisa la main et lui dit : « Ô cheikh Abou-Ali, ma maîtresse Khatoun te dit : « Laisse entrer chez nous cette sainte vieille pour qu’elle nous obtienne les grâces d’Allah ! Et sa bénédiction s’étendra peut-être sur nous tous ! » Alors le portier s’approcha de la vieille et voulut d’abord lui baiser la main ; mais elle recula vivement et l’en empêcha, disant : « Éloigne-toi de moi ! Toi, qui fais tes prières sans ablutions, comme tous les domestiques, tu vas me souiller de ton contact impur et rendre mon ablution nulle et vaine ! Qu’Allah te délivre de cette servitude, ô portier Abou-Ali, car tu es dans les bonnes grâces des Saints d’Allah et des Walis ! » Or ce souhait toucha à l’extrême le portier Abou-Ali, car précisément il avait un arriéré de trois mois de paye que ne lui donnait pas le terrible émir Fléau-des-Rues, et il était depuis longtemps dans une grande anxiété à ce sujet, et il ne savait quel moyen employer pour recouvrer son dû. Aussi il dit à la vieille : « Ô ma mère, fais-moi boire un peu d’eau de ton aiguière, pour qu’ainsi je puisse gagner de ta bénédiction ! » Alors elle prit l’aiguière de dessus son épaule et la fit tournoyer en l’air plusieurs fois, si bien que le tampon en fibres de palmier s’échappa du col et que les trois dinars d’or roulèrent sur le sol comme s’ils tombaient du ciel ! Et le portier se hâta de les ramasser, et dit en son âme : « Gloire à Allah ! Cette vieille mendiante est une sainte d’entre les saints qui ont les trésors cachés à leur disposi-