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histoire de dalila-la-rouée…
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son épouse, la jouvencelle, regretta également ses paroles un peu vives à l’égard de son maître. Et voilà pour le propriétaire de la maison située dans l’impasse pavée de marbre !

Mais pour ce qui est de Dalila-la-Rouée, voici ! Comme elle était arrivée sous les murs de la maison, elle vit soudain la jeune épouse de l’émir accoudée à sa fenêtre, telle une nouvelle mariée, si belle ! et brillante comme un vrai trésor de tous les bijoux dont elle était ornée, et lumineuse comme une coupole de cristal des blancs habits de neige dont elle était vêtue !

À cette vue, la vieille entremetteuse de malheur se dit en elle-même : « Ô Dalila, voici pour toi le moment arrivé d’entr’ouvrir le sac de tes fourberies ! Nous verrons bien si tu vas pouvoir attirer cette adolescente hors de la maison de son maître, et la dépouiller de ses bijoux et la dénuder de ses beaux vêtements, pour t’emparer de tout le lot ! » Alors elle s’arrêta sous la fenêtre de l’émir, et se mit à invoquer à haute voix le nom d’Allah, disant : « Allah ! Allah ! Et vous tous, les Amis d’Allah, les Walis Bienfaisants, éclairez-moi ! »

En entendant ces invocations, et en voyant cette sainte vieille vêtue comme les soufis mendiants, toutes les femmes du quartier accoururent baiser les. pans de son manteau et lui demander sa bénédiction ; et la jeune épouse de l’émir Fléau-des-Rues pensa : « Allah nous accordera ses grâces par l’entremise de cette sainte vieille ! » Et, les yeux mouillés d’émotion, la jouvencelle appela sa servante et lui dit : « Descends trouver notre portier le cheikh Abou-Ali,