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histoire de dalila-la-rouée…
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sait dans la recherche d’expédients pervers et redoutables.

Elle parcourut ainsi les divers quartiers de la ville, en passant d’une rue à une autre rue jusqu’à ce qu’elle fût arrivée à une impasse pavée de marbre et balayée et arrosée, au fond de laquelle elle vit une grande porte surmontée d’une magnifique corniche d’albâtre, sur le seuil de laquelle était assis le portier, un Moghrabin fort proprement habillé. Et cette porte était en bois de sandal garnie de solides anneaux en bronze et d’un cadenas en argent. Or cette maison appartenait au chef des gardes du khalifat, un homme fort considéré et propriétaire de grands biens, meubles et immeubles, auquel il était alloué de gros émoluments pour ses fonctions ; mais c’était aussi un homme très violent et mal maniéré ; et c’est pourquoi on l’appelait Mustapha Fléau-des-Rues, vu que chez lui les coups précédaient toujours la parole ! Il était marié avec une jouvencelle charmante qu’il aimait beaucoup et à qui il avait juré, lors de la nuit de sa pénétration première, de ne jamais prendre une seconde femme de son vivant et de ne jamais dormir une nuit hors de sa maison. Et il en fut ainsi jusqu’à ce qu’un jour Mustapha Fléau-des-Rues, étant allé au Diwân, vit que chaque émir avait avec lui un fils ou deux. Et ce jour-là précisément il alla ensuite au hammam et, s’étant regardé dans un miroir, vit que les poils blancs de sa barbe l’emportaient en nombre sur les poils noirs qu’ils recouvraient complètement, et il se dit en lui-même : « Est-ce que Celui qui a déjà pris ton père, ne va pas enfin te gratifier d’un fils ? » Et