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histoire magique du cheval d’ébène
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de son côté pour voir ce qu’il allait faire. Et aussitôt le cheval se mit à s’agiter, à palpiter, à haleter, à piaffer, à se balancer, à se pencher, à avancer et à reculer, pour ensuite, avec une élasticité merveilleuse, commencer à caracoler et à marcher de côté plus élégamment que ne caracolèrent jamais les chevaux le mieux dressés des rois et des sultans. Et soudain ses flancs frémirent et se gonflèrent de vent, et, plus rapide qu’une flèche lancée dans les airs, il prit son essor en s’élevant avec son cavalier en ligne droite dans le ciel !

À cette vue, le roi faillit s’envoler de surprise et de fureur, et cria aux chefs de ses gardes : « Ho ! malheur à vous ! attrapez-le ! attrapez-le ! Il nous échappe ! » Mais ses vizirs et ses lieutenants lui répondirent : « Ô roi, est-ce qu’un homme peut atteindre l’oiseau qui a des ailes ? Celui-là n’est certainement pas un homme comme les autres, mais un puissant magicien ou quelque éfrit ou mared d’entre les éfrits et les mareds de l’air ! Et Allah t’a délivré de lui, et nous avec toi ! Remercions donc le Très-Haut qui a bien voulu te sauver d’entre ses mains, et ton armée avec toi ! »

Alors le roi, à la limite de l’émotion de la perplexité, retourna à son palais et, entrant chez sa fille, la mit au courant de ce qui venait de se passer sur le meidân. Et la jeune fille, à la nouvelle de la disparition du jeune prince, fut si affligée et si désespérée, et pleura et se lamenta si douloureusement, qu’elle tomba gravement malade et fut étendue, sur son lit, en proie à la chaleur de la fièvre et à la noirceur des idées ! Et son père, la voyant dans cet