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le parterre fleuri… (le partage)
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sourcils, et lui dit : « Et de quoi ris-tu donc ainsi ? Serait-ce par folie ou par moquerie ? » Massrour répondit : « Non, par Allah ! ô émir des Croyants, je te le jure par la parenté qui te rattache au Prophète, si je ris ce n’est point par l’effet d’aucune de ces causes, mais simplement parce que je me suis rappelé les bons mots d’un certain Ibn Al-Karabi autour duquel on faisait cercle hier sur le Tigre pour l’écouter. » Le khalifat dit : « Dans ce cas, va vite me chercher cet Ibn Al-Karabi. Peut-être réussira-t-il à me dilater un peu la poitrine ! »

Aussitôt il courut à la recherche du plaisant Ibn Al-Karabi et, l’ayant rencontré, lui dit : « J’ai parlé de toi au khalifat, et il m’envoie te chercher pour que tu le fasses rire. » Il répondit : « J’écoute et j’obéis ! » Massrour alors ajouta : « Oui ! je veux bien te conduire auprès du khalifat, mais c’est, bien entendu, à la condition que tu me donneras les trois quarts de ce que t’accordera le khalifat comme rémunération ! » Ibn Al-Karabi dit : « C’est trop ! Je te donnerai les deux tiers pour ton courtage. Ce sera suffisant ! » Massrour, après quelques difficultés, pour la forme, finit par accepter l’accord, et conduisit l’homme auprès du khalifat.

Al-Rachid, en le voyant entrer, lui dit : « On prétend que tu sais de bons mots fort amusants. Dévide-les pour voir ! Mais sache bien que si tu ne parviens pas à me faire rire, la bastonnade t’attend ! »

Cette menace eut pour résultat de glacer complètement l’esprit d’Ibn Al-Karabi qui ne sut alors trouver que des banalités à l’effet désastreux ; car Al-Rachid, au lieu d’en rire, sentit augmenter son irri-