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les mille nuits et une nuit


LE JOUVENCEAU ET SON MAÎTRE


On raconte que le vizir Badreddîn, gouverneur du Yamân, avait un frère qui était un jouvenceau doué d’une beauté incomparable, tellement que sur son passage les hommes et les femmes se retournaient pour l’admirer et se baigner les yeux de ses charmes. Aussi le vizir Badr, craignant pour lui quelque aventure considérable, le tenait-il soigneusement éloigné des regards des hommes et l’empêchait-il de fréquenter les jeunes gens de son âge. Comme il ne voulait pas le mettre à l’école, de peur de ne pouvoir assez le surveiller, il lui fit venir à la maison, comme maître, un cheikh vénérable et pieux, aux mœurs notoirement chastes, et le mit entre ses mains. Et le cheikh se rendait ainsi tous les jours auprès de son élève, avec lequel il s’enfermait quelques heures dans une chambre que le vizir leur avait réservée pour les leçons.

Au bout d’un certain temps, la beauté et les charmes de l’adolescent ne manquèrent pas d’opérer leur effet habituel sur le cheikh qui finit par devenir éperdument épris de son élève et sentir son âme, à sa vue, chanter de tous ses oiseaux et réveiller par son chant tout ce qui était endormi.

Aussi, ne sachant plus que faire pour calmer son émoi, il se décida un jour à faire part du trouble de