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les mille nuits et une nuit

prononcé la formule invocatoire. Il mangea donc jusqu’à satiété ; puis il remercia Allah disant : « Louanges Lui soient rendues en toute occasion ! » Après quoi, il se lava les mains et remercia tous les convives pour leur amabilité.

Alors seulement le maître, suivant les usages qui ne permettent de questionner l’hôte que lorsqu’on lui a servi à manger et à boire, dit au portefaix : « Sois ici le bienvenu, et mets-toi largement à ton aise ! Que ta journée soit bénie ! Mais, ô mon hôte, peux-tu me dire ton nom et ta profession ? » Il lui répondit : « Ô mon maître, je m’appelle Sindbad le Portefaix, et ma profession consiste à porter sur ma tête des charges, moyennant salaire. » Le maître du lieu sourit et lui dit : « Sache, ô portefaix, que ton nom est comme mon nom, car je m’appelle Sindbad le Marin ! »

Puis il continua : « Sache aussi, ô portefaix, que, si je t’ai prié de venir ici, c’est pour t’entendre répéter les belles strophes que tu chantais quand tu étais assis dehors sur le banc ! »

À ces paroles, le portefaix devint fort confus et dit : « Par Allah sur toi ! ne me blâme pas trop pour cette action inconsidérée ; car les peines, les fatigues et la misère qui ne laisse rien dans la main apprennent à l’homme l’impolitesse, la sottise et l’insolence ! » Mais Sindbad le Marin dit à Sindbad le Portefaix : « N’aie aucune honte de ce que tu as chanté et sois ici sans gêne, car désormais tu es mon frère. Seulement hâte-toi, je t’en prie, de me chanter ces strophes que j’ai entendues et qui m’ont fort émerveillé ! » Alors le portefaix chanta les