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histoire de karamalzamân avec boudour
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« Tant j’aime mon amie que je jalouse même la chemise qui touche ses flancs, quand la chemise serre de trop près ses beaux flancs bénis et si doux !

« Tant j’aime mon amie que je jalouse la coupe qui touche ses lèvres gentilles, quand la coupe s’attarde trop sur ses lèvres taillées pour le baiser.

« Ne me blâmez pas de l’aimer si passionnément ; déjà je souffre assez de mon amour lui-même.

« Ah ! si vous saviez ses mérites ! Elle est aussi séduisante que Joseph chez Pharaon, aussi mélodieuse que David devant Saül, aussi modeste que Marie, mère de Christ.

« Et moi je suis aussi triste que Jacob loin de son fils, aussi malheureux que Jonas dans la baleine, aussi éprouvé que Job sur la paille, aussi déchu qu’Adam poursuivi par l’Ange !

« Ah ! rien ne me guérira, que l’approche de l’amie ! »

Lorsque Kamaralzamân eut entendu ces vers, il sentit une grande fraîcheur entrer en lui, et lui apaiser l’âme, et il fit signe à son père de faire asseoir le jeune homme près de lui et de le laisser seul avec lui. Et le roi, ravi de constater que son fils s’intéressait à quelque chose, se hâta d’inviter Marzaouân à prendre place près de Kamaralzamân et sortit de la salle après avoir cligné de l’œil au vizir pour lui dire de le suivre.

Alors Marzaouân se pencha vers l’oreille du prince et lui dit :

« Allah m’a conduit jusqu’ici pour servir d’intermédiaire entre toi et celle que tu aimes. Et pour t’en