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les mille nuits et une nuit

et qui avait laissé à son amoureuse un souvenir si vivace. Mais il se garda bien de s’en expliquer au grand-vizir, et lui dit seulement : « Je suis sûr qu’en voyant le jeune homme je jugerai mieux du traitement à lui appliquer et grâce auquel je le guérirai, si Allah veut ! » Et le vizir, sans tarder, l’introduisit auprès de Kamaralzamân.

Or, la première chose qui frappa Marzaouân, en regardant le prince, fut sa ressemblance extraordinaire avec Sett Boudour. Et il en fut tellement stupéfait qu’il ne put s’empêcher de s’exclamer : « Ya Allah ! Béni soit Celui qui crée des beautés si semblables, en leur donnant les mêmes attributs et les mêmes perfections ! »

En entendant ces paroles, Kamaralzamân qui était étendu dans son lit, bien languissant et les yeux à demi-fermés, ouvrit complètement les yeux et tendit l’oreille. Mais déjà Marzaouân, mettant à profit cette attention de l’adolescent, improvisait ces vers pour lui faire comprendre, d’une manière enveloppée, ce que le roi Schahramân et le grand-vizir ne devaient pas comprendre :

« Je vais essayer de chanter les mérites d’une beauté, cause de mes souffrances, pour faire revivre le souvenir de ses charmes anciens.

« On me dit : « Ô toi qu’a blessé la flèche de l’amour, lève-toi ! Voici la coupe pleine et la guitare pour te réjouir ! »

« Je leur dis : « Comment pourrais-je me réjouir, puisque j’aime ! Y a-t-il plus grande joie que celle de l’amour et que la souffrance d’amour ?