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histoire de karamalzamân avec boudour
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Lorsque la nourrice et les dix autres femmes eurent entendu ces paroles, elles levèrent les bras au ciel et s’écrièrent : « Ô confusion ! ô notre maîtresse, préservée sois-tu de la folie et des embûches malignes et du mauvais œil ! Tu dépasses vraiment les limites de la plaisanterie, ce matin ! » Et la nourrice, en se frappant la poitrine, dit : « Ô ma maîtresse Boudour, quel discours ! Par Allah sur toi ! si ces propos plaisants parvenaient aux oreilles du roi, il ferait sortir nos âmes à l’heure même ! Et aucune puissance ne saurait nous sauvegarder de son courroux ! » Mais Sett Boudour, les lèvres frémissantes, s’écria : « Encore une fois, je te demande si, oui ou non, tu veux me dire où se trouve maintenant le beau garçon dont je porte encore les traces sur le corps ? » Et Boudour voulut faire le geste d’entr’ouvrir sa chemise.

À cette vue, toutes les femmes se jetèrent le visage contre terre et s’écrièrent : « Quel dommage pour sa jeunesse qu’elle soit devenue folle ! » Or, ces paroles mirent la princesse Boudour dans une colère telle qu’elle décrocha du mur une épée et se précipita sur les femmes pour les transpercer. Alors, affolées, elles se précipitèrent dehors en se bousculant et en hurlant, et arrivèrent, pêle-mêle et le visage défait, dans l’appartement du roi. Et la nourrice, les larmes aux yeux, mit le roi au courant de ce que venait de dire Sett Boudour, et ajouta : « Elle nous eût toutes tuées ou assommées si nous n’avions pris la fuite ! » Et le roi s’écria : « La chose est assez énorme ! Mais as-tu vu toi-même si vraiment elle a perdu ce qu’elle a perdu ? » La nourrice se cacha le vi-