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histoire de karamalzamân avec boudour
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sur son séant en portant les deux mains sur son devant ! Mais aussitôt elle jeta un cri de terreur et d’étonnement en apercevant près d’elle le jeune homme couché sur le flanc. Mais, dès le premier regard qu’elle lui jeta, elle ne tarda pas à passer de la frayeur à l’admiration et de l’admiration au plaisir et du plaisir à un épanchement de joie qui atteignit bientôt au délire.

En effet, dans sa frayeur première, elle pensa en son âme : « Infortunée Boudour, tu es compromise pour toujours ! Voici dans ton lit un jeune étranger que tu n’as jamais vu ! Quelle audace est la sienne ! Ah ! je vais crier aux eunuques d’accourir et de le jeter du haut de mes fenêtres dans le fleuve ! Pourtant, ô Boudour, qui sait si ce n’est point là le mari que ton père t’a choisi ? Regarde-le d’abord, ô Boudour, avant de recourir à la violence ! »

Et c’est alors que Boudour jeta un coup d’œil sur l’adolescent, et de ce rapide examen elle fut éblouie de sa beauté et s’écria : « Ah ! mon cœur ! qu’il est gentil ! » Et, à l’instant même, elle fut si entièrement captivée, qu’elle se pencha sur cette bouche souriante de sommeil et l’exprima d’un baiser entre ses lèvres en s’écriant : « Que c’est bon ! Par Allah ! celui-là, oui, je le veux pour époux ! Pourquoi mon père a-t-il si longtemps tardé à me l’amener ! » Puis elle prit, en tremblant, la main du jeune homme et la mit entre ses deux mains et lui parla fort gentiment pour le réveiller, disant : « Ô gentil ami, ô lumière de mes yeux, ô mon âme, lève-toi ! lève-toi ! Viens m’embrasser, viens ! mon chéri, viens ! par ma vie sur toi ! réveille-toi ! »